Planification visant les frais d’homologation et l’impôt sur l’administration des successions (sauf au Québec)

Canada Vie - 7 novembre 2022
Six stratégies de planification efficaces visant les frais d’homologation qu’il convient d’envisager lorsqu’il est question du plan successoral global du client
Probate article

Les frais d’homologation (également connus sous le nom d’impôt sur l’administration des successions) sont calculés en fonction de la valeur de la succession. Les stratégies de planification visant les frais d’homologation ont pour but d’éviter que les actifs passent par la succession ou de réduire la valeur des actifs de la succession nécessitant une homologation. Les stratégies efficaces ont notamment recours à l’assurance vie, aux fonds distincts et aux régimes enregistrés.

Frais d’homologation et impôt sur l’administration des successions

C’est le testament qui donne au fiduciaire testamentaire le droit d’agir au nom de la succession. L’homologation est un processus qui confirme la validité d’un testament et certifie, pour le bénéfice et la protection des tiers, que le testament est bien le dernier testament du défunt et que le fiduciaire testamentaire est autorisé à agir au nom de la succession. Cela explique pourquoi les banques et les compagnies d’assurance exigent habituellement qu’un testament homologué leur soit fourni avant de verser les sommes dues à une succession ou d’accepter les directives d’un fiduciaire testamentaire. Une fois l’homologation obtenue, le testament devient un document accessible au public et, sauf dans de très rares cas, peut être consulté par n’importe qui au palais de justice local du défunt.

Chaque province établit ses propres règles en matière d’homologation et de structure des frais d’homologation, mais à la base, le calcul des frais et le processus judiciaire sont analogues. Le montant des frais d’homologation est habituellement fonction de la juste valeur marchande des actifs de la succession au décès. Une liste des barèmes provinciaux pour les frais d’homologation et l’impôt sur l’administration des successions figure à la fin du présent article.

L’homologation donne lieu à des frais juridiques ou d’une autre nature (ou à de l’impôt) et compromet en partie la protection des renseignements personnels. La planification de l’homologation vaut la peine qu’on s’y intéresse. Cela étant dit, la planification visant les frais d’homologation ne constitue qu’un élément de la discussion plus large sur la planification financière. Dans certains cas, il est préférable de passer par le processus d’homologation pour répondre à d’autres objectifs de planification successorale, notamment celui d’avoir la certitude que les actifs iront à la bonne personne ou au bon organisme, ou celui d’enclencher un délai de prescription relativement aux réclamations pour le soutien de personnes à charge. De plus, les stratégies de planification visant les frais d’homologation peuvent aller à l’encontre des stratégies de planification fiscale (avant et après le décès) et devraient être envisagées après consultation auprès d’un fiscaliste.

Stratégies de planification visant les frais d’homologation

Désignations de bénéficiaire (produits d’assurance non enregistrés)

Dans le cas d’un produit d’assurance, la désignation d’un bénéficiaire (autre que la succession) garantit, sauf dans de rares cas, que la prestation de décès sera versée au bénéficiaire à l’extérieur de la succession et, par conséquent, sans être assujettie au processus d’homologation. La Canada Vie offre des produits qui permettent au propriétaire de désigner un ou plusieurs bénéficiaires de la prestation qui sera versée au décès de la personne assurée ou du rentier:

  • Assurance vie
  • Fonds distincts
  • Rentes (à l’intérieur d’une période garantie ou aux termes d’une option de remboursement de la prime)
  • OIG d’une assurance
  • Assurance maladies graves avec remboursement de la prime au décès (dans certaines provinces)
     

Si aucun bénéficiaire n’est désigné ou si le bénéficiaire décède avant la personne assurée ou le rentier, la prestation de décès est versée à la succession. Un bénéficiaire subsidiaire peut être nommé pour parer à l’éventualité du décès du bénéficiaire en premier ordre avant celui de la personne assurée ou du rentier.

La prestation de décès d’un produit d’assurance est versée en franchise d’impôt au bénéficiaire. Dans le cas d’une assurance vie, des fonds distincts, des rentes et des OIG d’une d’assurance, la désignation d’un bénéficiaire permet presque toujours de contourner la succession et offre ce qui suit :

  • Protection potentielle contre les créanciers – Les produits d’assurance peuvent être protégés contre les créanciers du propriétaire de la police lorsque le bénéficiaire désigné de la police :
    • Est irrévocable ou
    • Est le conjoint, le père, la mère, un enfant ou un petit-enfant de la personne assurée ou du rentier1
  • Versement rapide – En règle générale, la prestation de décès est versée dans les deux semaines suivant la présentation de la demande de règlement.
  • Protection des renseignements personnels – Le versement de la prestation de décès ne relève pas du domaine public2
  • Frais de succession réduits – Réduction des frais juridiques, des frais comptables et des honoraires de l’exécuteur testamentaire pour la succession 
     

L’exemple suivant utilise les taux en vigueur en Ontario pour comparer les frais d’homologation à payer par deux successions. Le défunt de la succession A a utilisé des produits d’assurance comportant un bénéficiaire désigné et le défunt de la succession B a utilisé des placements traditionnels qui passent par la succession.

Impôt sur l’administration des successions de l’Ontario (homologation) Valeurs successorales Valeurs successorales
Succession de 1 500 000 $ au décès Succession A Succession B 
Maison 600 000 $ 600 000 $
CPG détenus auprès de banques 0 400 000 $
Fonds communs de placement 0 500 000 $
OIG d’une assurance  400 000 $  
Valeur totale de la succession 500 000 $  
Valeur totale de la succession 1 500 000 $ 1 500 000 $
Succession assujettie à l’homologation 600 000 $ 1 500 000 $
Frais d’homologation 
(impôt sur l’administration des successions) 
   
Première tranche de 50 000 $
(aucun impôt)
0 0
Autres tranches
(15 $ par tranche de 1 000 $)
8 250 $ 21 750 $
Total des frais d’homologation 8 250 $ 21 750 $
Économie  13 500 $  


Désignation de bénéficiaires – régimes enregistrés seulement
Les régimes de pension enregistrés, les régimes enregistrés d’épargne retraite (REER), les fonds enregistrés de revenu de retraite (FERR) et les comptes d’épargne libre d’impôt (CELI) facilitent également la désignation d’un bénéficiaire. Dans le cadre d’un régime enregistré, la désignation d’un bénéficiaire (autre que la succession) fait en sorte, sauf dans de rares cas, que la prestation de décès est versée à l’extérieur de la succession et n’est pas assujettie à l’homologation3. Les fonds distincts de la Canada Vie – et d’autres instruments comme les fonds communs de placement – peuvent être détenus dans des REER, des FERR et des CELI.

Les REER et les FERR prévoient le versement d’une somme en franchise d’impôt au bénéficiaire, somme qui est considérée comme un revenu dans la déclaration finale du défunt, et les impôts connexes sont payables par la succession (à moins de pouvoir effectuer un roulement au conjoint ou à une personne à charge admissible). Apprenez-en plus sur la planification fiscale et successorale avancée : l’imposition au décès d’un rentier détenant un REER, d’un rentier détenant un FERR ou d’un titulaire d’un CELI. La dette fiscale qui en découle pourrait avoir une incidence sur les actifs que les bénéficiaires de la succession pourront recevoir. De plus, le bénéficiaire d’un REER ou d’un FERR est solidairement responsable des dettes fiscales du défunt liées à l’inclusion du revenu provenant du régime enregistré, jusqu’à concurrence du montant reçu provenant du régime enregistré4. L’Agence du revenu du Canada (ARC) peut demander les sommes exigibles au bénéficiaire du régime enregistré sans d’abord essayer de les obtenir de la succession5.

Testaments multiples
En Ontario et en Colombie-Britannique, la planification peut se faire autrement; on peut planifier en vue de réduire les frais d’homologation au moyen de plusieurs testaments. Un testament portera sur les actifs qui, en général, nécessitent une homologation, comme les biens immobiliers et les comptes bancaires et de courtage (le testament principal), tandis qu’un autre testament portera sur les actifs qui ne devraient pas nécessiter d’homologation, comme les actions d’une société fermée (le testament secondaire). Le testament principal est homologué, tandis que le testament secondaire ne l’est pas. Les actifs du testament secondaire sont donc à l’abri des frais d’homologation. Les testaments devraient être préparés par un conseiller juridique en droit successoral qui connaît bien cette stratégie. Comme les actions d’une société fermée n’ont pas à passer par l’homologation, le recours à plusieurs testaments constitue une stratégie efficace pour mettre la valeur des actions à l’abri des frais d’homologation.

L’ARC a confirmé qu’un contribuable se trouve à avoir une seule succession même s’il a mis en œuvre une stratégie de planification testamentaire faisant appel à plusieurs testaments. Par conséquent, les fiducies créées au décès aux termes du testament principal et du testament secondaire pourraient être traitées comme une succession assujettie à l’imposition à taux progressifs. En général, les successions assujetties à l’imposition à taux progressifs comportent des avantages fiscaux auxquels n’ont pas accès les successions ordinaires : taux d’imposition progressifs, règles sur les dons de bienfaisance plus souples et plus d’options de planification posthumes pour les propriétaires d’entreprise.

Dons entre vifs
La distribution de votre patrimoine avant votre décès est aussi une stratégie de planification visant les frais d’homologation. Évidemment, vous n’aurez plus le contrôle des actifs et, à l’avenir, vous ne pourrez plus en disposer. Une solution simple consisterait à faire plutôt don du bien à une fiducie discrétionnaire entre vifs où vous seriez à la fois le fiduciaire et un bénéficiaire. Le revenu tiré de ce bien vous sera attribué, mais au moins, vous garderez le contrôle sur le bien et le revenu qui en est tiré. Les biens transférés dans une fiducie le sont sur une base imposable et peuvent donner lieu à un gain en capital réalisé par le cédant. On peut éviter cela lorsque le cédant a 65 ans ou plus en établissant une fiducie en faveur de soi-même ou une fiducie mixte en faveur du conjoint, comme il en est question ci-après.

Lorsque des dons sont faits à titre gratuit à des membres de la famille, ceux-ci peuvent donner lieu à une présomption de fiducie résultoire. Dans ce cas, au décès du cédant, on considère que le destinataire détient le bien en fiducie au profit de la succession. Ces actifs seraient inclus dans la succession aux fins d’homologation. La présomption de fiducie résultoire peut être réfutée au moyen d’une preuve du cédant quant à son intention de faire un don. Pour éviter toute incertitude et la possibilité de poursuites judiciaires, l’intention de transfert à titre gratuit doit être clairement établie par écrit.

Propriété conjointe avec droit de survie
La propriété détenue conjointement par les propriétaires, avec droit de survie, devient la propriété exclusive du propriétaire survivant au décès de l’autre propriétaire conjoint. Le testament du défunt ne s’appliquerait pas à cette propriété et, par conséquent, l’intérêt du défunt dans celle-ci ne serait pas assujetti aux frais d’homologation. Il pourrait y avoir des répercussions fiscales dont il faudra tenir compte lors de l’élaboration de l’entente de propriété conjointe. Il y a une disposition réputée des immobilisations, comme les titres négociables et les biens immobiliers, qui sont transmises aux nouveaux propriétaires conjoints, et ce, sur une base proportionnelle. De plus, la propriété conjointe peut être la source de difficultés et d’enjeux pratiques, comme le contrôle sur les actifs et le risque de réclamation d’un tiers alléguant qu’il s’agit d’une fiducie résultoire plutôt que d’un don immédiat (décrit ci-dessus).

Fiducies en faveur de soi-même et fiducies mixtes au profit du conjoint 
Lorsqu’une personne atteint l’âge de 65 ans, elle peut créer une fiducie en faveur d’elle-même ou une fiducie mixte au profit du conjoint. La propriété peut être transférée à ces fiducies sous la forme d’un roulement d’impôt, les polices d’assurance vie étant exclues. Ce roulement ne donne lieu à aucune répercussion fiscale immédiate, bien que la fiducie soit réputée avoir disposé du bien aux fins de l’impôt au décès du constituant (ou au dernier décès, celui du constituant ou encore du conjoint dans le cas d’une fiducie mixte au profit du conjoint). Le constituant (et son conjoint dans le cas d’une fiducie mixte au profit du conjoint) a droit à la totalité du revenu net de la fiducie de son vivant, et personne d’autre n’a droit au capital pendant cette période.

Ces fiducies ne comportent habituellement pas d’avantages fiscaux. Elles sont mises en œuvre dans le cadre d’une planification visant les frais d’homologation, puisque les biens de la fiducie sont transmis au bénéficiaire de la fiducie au décès du constituant (ou au dernier décès, celui du constituant ou encore du conjoint dans le cas d’une fiducie mixte au profit du conjoint), sans passer par la succession. Les fiducies en faveur de soi-même et les fiducies mixtes au profit du conjoint offrent d’autres avantages, comme la protection de la vie privée, une protection potentielle contre les créanciers et une solution de rechange à la gestion des biens au moyen d’une procuration.

Résumé

La planification visant les frais d’homologation est un volet important d’un plan successoral complet et peut faire économiser des milliers de dollars en frais. Les produits d’assurance de la Canada Vie rendent possible le contournement de la succession grâce à la désignation d’un bénéficiaire. Il existe de nombreuses stratégies de planification visant les frais d’homologation et elles devraient fonctionner en tandem avec le plan successoral global du client.


1 Le présent article ne s’applique pas aux successions du Québec. La protection contre les créanciers n’est jamais garantie. Les clients et propriétaires de police devraient consulter leur avocat pour en apprendre davantage sur la protection potentielle contre les créanciers, la législation actuelle et la jurisprudence dans leur province ou territoire.
2 En Saskatchewan, les exécuteurs d’un testament homologué doivent divulguer, dans des dossiers accessibles au public (sauf de rares exceptions) toutes les polices d’assurance vie connues qui étaient détenues par le défunt, y compris les polices de fonds distincts. Ils doivent dresser la liste des compagnies d’assurance, des numéros de police, des bénéficiaires désignés et de la valeur des polices au moment du décès.
3 Ce n’est pas le cas des régimes enregistrés détenus par un intermédiaire aux termes d’une entente.
4 Article 160.2 de la Loi de l’impôt sur le revenu (Canada)
5 Voir O’Callaghan c. La Reine, 2016 DTC 1141 (CCI